Pierre Naville, surréaliste et révolutionnaire
Publié le 3 Mars 2018
Intellectuel marxiste et militant révolutionnaire, Pierre Naville reste une figure méconnue. Il navigue à contre-courant des conformismes politiques. Il participe au mouvement surréaliste avant de se tourner vers la révolution prolétarienne. Pierre Naville grandit pourtant dans le milieu de la haute bourgeoisie. Il découvre la révolte avec les surréalistes. Il rejoint André Breton et Benjamin Péret pour devenir codirecteur de la revue La Révolution surréaliste. Pierre Naville désire alors changer la vie et attaquer l’ordre bourgeois.
Mais il délaisse la poésie et la littérature pour se tourner vers l’action politique et révolutionnaire. Il devient un intellectuel marxiste et un militant communiste. Il participe à la revue Clarté et découvre les thèses de l’opposition de gauche en URSS incarnée par Léon Trotsky. Ce marxiste hétérodoxe s’attache ensuite à analyser les évolutions de la société et à renouveler le socialisme. L’historien Alain Cuenot retrace ce parcours singulier pour éclairer le XXe siècle dans son livre Pierre Naville. Biographie d’un révolutionnaire.
Le jeune Pierre Naville s’intéresse aux débats politiques mais aussi à la littérature qui ouvre sur l’imaginaire. Etudiant de philosophie à la Sorbonne, il s’intéresse aussi à l’actualité sociale et politique. Cette période est surtout marquée par la Révolution russe. Pierre Naville participe également à la revue L’Oeuf dur qui tente de sortir la littérature des carcans académiques.
Pierre Naville découvre la richesse de l’univers surréaliste. « L’écriture automatique, le rêve, le merveilleux, les états hallucinatoires sont autant de domaines à explorer, objets d’expérimentation poétique d’une profonde originalité qui visent à la libération et à l’émancipation de l’esprit », décrit Alain Cuenot. Le langage automatique et les expérimentations littéraires permettent de libérer la créativité. Les surréalistes écrivent également sur la sexualité. Mais Pierre Naville regrette que ces textes n’attaquent pas ouvertement la morale bourgeoise pour appeler à la libération sexuelle. Pierre Naville s’intéresse également à la peinture surréaliste. Mais il s’attache à dénoncer la récupération marchande, avec sa production routinère et attendue, qui guette déjà certains peintres surréalistes. Pierre Naville accorde également de l’importance à d’autres formes d’expression artistique comme la photographie, le cinéma ou le spectacle de rue.
Des clivages opposent les surréalistes. Certains privilégient une simple activité littéraire. D’autres sont portés par un esprit de révolte. Antonin Artaud dénonce toutes les formes d’oppression. Il écrit des textes contre le gouvernement, contre la critique littéraire et ses représentants, contre les médecins chefs des asiles de fous, contre les recteurs de toutes les universités. Des lettres manifestes sont adressées à ces incarnations du pouvoir. Antonin Artaud ne se contente pas de simples jeux littéraires. Il incite ses amis surréalistes à attaquer le pouvoir et ses institutions qui sont des entraves à la liberté de l’esprit. Antonin Artaud guide les surréalistes vers une contestation de la société bourgeoise. Pour Pierre Naville, la révolte poétique doit s’accompagner d’une action matérielle concrète. En revanche, Antonin Artaud valorise une libération totale de l’esprit avant tout dans les domaines littéraire et artistique.
En 1925, Pierre Naville doit faire son service militaire. Aucun poème ne peut lutter contre l’armée et son institution bourgeoise. Le surréaliste se trouve confronté à la réalité matérielle dans le contexte de la guerre au Maroc. Il ne supporte pas l’encadrement militaire avec son climat d’étouffement et d’autoritarisme. Cet épisode le conduit définitivement vers un engagement communiste.
Mais Pierre Naville déplore que l’engagement des surréalistes se cantonne à un anarchisme instinctif sans s’appuyer sur l’analyse marxiste. Les surréalistes publient une déclaration avec les rédacteurs de la revue Clarté. Ce texte dénonce le colonialisme et le capitalisme. Ils insistent sur la nécessité d’une révolution sociale. Mais André Breton estime que le soulèvement prolétarien ne doit pas gommer la nécessité d’une insurrection de l’esprit. Cet engagement communiste reste instinctif et ne s’appuie pas sur une réflexion sur la lutte des classes. Les surréalistes connaissent peu les débats qui agitent le mouvement ouvrier.
En 1926, Pierre Naville adhère au Parti communiste. Il polémique avec André Breton à travers la brochure intitulée « La Révolution et les intellectuels ». Pierre Naville estime que l’abolition des conditions bourgeoises de la vie matérielle reste indispensable pour permettre une véritable libération de l’esprit. « Les poètes, les penseurs, les artistes de la révolution ne peuvent naître que du prolétariat victorieux », estime Pierre Naville. Contre l’individualisme des surréalistes, il valorise la dimension collective de la lutte des classes. André Breton ironise sur le dogmatisme de la propagande communiste. Le journal L’Humanité se contente de commenter l’actualité sans aucun recul critique, notamment sur l’URSS. Ensuite, les communistes valorisent le travail et méprisent les prisonniers de droit commun. Le bolchevisme paraît particulièrement autoritaire et conformiste.
En 1926, Pierre Naville devient le directeur de Clarté, la revue intellectuelle du Parti communiste. Il veut sortir ce titre d’un positionnement banalement de gauche. Clarté doit exprimer un marxisme révolutionnaire pour critiquer le réformisme et la social-démocratie. Clarté doit devenir une arme réelle pour la classe ouvrière. Ses analyses doivent permettre de comprendre la société marchande pour mieux la combattre.
Pierre Naville exerce une forte influence politique auprès des surréalistes. André Breton le suit dans l’engagement communiste. Pierre Naville ouvre les colonnes de Clarté aux écrits des surréalistes. « Leur participation se fonde uniquement sur la puissance de contestation et de subversion extrêmement féconde de la pensée surréaliste et non sur une investigation culturelle et doctrinale hasardeuse et pseudo prolétarienne », observe Alain Cuenot. Les dirigeants communistes, qui préfèrent les textes de propagande, n’apprécient pas les surréalistes. Pierre Naville soutient ses amis contre les bureaucrates du PCF qui incarnent le formalisme et l’orthodoxie.
Mais Pierre Naville aborde désormais l’actualité sociale et politique, comme la grève des mineurs anglais. Sa révolte s’éloigne de celle des surréalistes pour s’exercer sur le terrain de la lutte des classes. Pourtant, les articles de Pierre Naville s’alignent sur l’idéologie stalinienne. Il défend les bureaucraties syndicales et recrache un anti-impérialisme à la solde de l’URSS. Mais Pierre Naville milite activement dans une cellule communiste aux côtés de camarades ouvriers. Le PCF ne réserve pas encore un statut de supériorité aux intellectuels.
Pierre Naville polémique contre Barbusse, écrivain phare du PCF qui dirige les pages littéraires de L’Humanité. Barbusse défend une conception idéaliste et morale du communisme, très éloignée de la lutte des classes. Ensuite, il se rattache à une vision rationaliste qui occulte les structures économiques et sociales. Pour Pierre Naville, la révolution ne doit se réaliser au nom de la Raison, mais pour l’émancipation de la classe ouvrière. Il dénonce également l’idée d’un monde littéraire au-delà des classes sociales.
Pierre Naville s’éloigne de la discipline du Parti à travers les écrits de Victor Serge. Figure de l’opposition de gauche proche de Trotsky, ce militant propose des analyses critiques des positions staliniennes. Pierre Naville se rend même à Moscou pour rencontrer Léon Trotsky. Il diffuse les idées de l’opposition de gauche et se fait exclure du PCF. Pierre Naville décide la suppression de Clarté pour lancer sa nouvelle revue La lutte de classes.
Pierre Naville et Alfred Rosmer structurent l’opposition de gauche en France. Ils permettent l’émergence du mouvement trotskiste. En 1930, Pierre Naville adhère à la Ligue communiste. Il tente de redresser le mouvement communiste contre le Parti et l’Internationale communiste contrôlée par Staline. Pour Pierre Monatte et Ferdinand Loriot, cette stratégie se révèle illusoire. Les syndicalistes d’action directe de La Révolution prolétarienne estiment qu’il n’y a rien à attendre d’un mouvement fourvoyé dans le stalinisme. Pierre Naville considère qu’ils se centrent trop sur le syndicalisme et délaissent les enjeux internationaux. Dans une logique de purisme révolutionnaire, il refuse les compromis et les alliances avec les autres groupes proches de l’opposition de gauche.
Trotsky n’apprécie pas l’orientation que Pierre Naville donne à La Vérité. Ce journal doit rester une feuille illisible consacrée aux questions doctrinales et idéologiques selon Trotsky. Pierre Naville veut en faire un véritable journal qui aborde également des sujets artistiques et littéraires. Trotsky juge que ces préoccupations n’intéressent pas les ouvriers. Ensuite, il dénonce un article consacré à Panaït Istrati, romancier qui critique l’URSS. Trotsky estime que Pierre Naville reste trop hostile au stalinisme et au PCF. Il préfère les basses manœuvres politiciennes de Raymond Molinier pour tenter de peser sur la ligne du PCF. Mais les trotskistes mènent des combats minoritaires et précurseurs contre le colonialisme, contre le fascisme et contre la terreur stalinienne.
André Breton se rapproche de Trotsky. Les deux hommes fondent la FIARI (Fédération internationale pour un art révolutionnaire indépendant). Ils estiment que la liberté artistique et la créativité ne doivent pas être subordonnées à des impératifs politiques. De son côté, Pierre Naville sépare l’engagement politique de la créativité. « Il faut être, soit un militant révolutionnaire, soit un intellectuel qui se consacre entièrement à l’art, alternative radicale qui repousse toute confusion idéologique, tout idéalisme de type révolutionnaire creux et inconséquent », analyse Alain Cuenot.
Cette démarche permet d’éviter la posture de l’intellectuel engagé avec son moralisme béat sans la moindre analyse politique. Au contraire, le statut d’intellectuel ne fournit pas une supériorité politique. Mais l’ancien surréaliste Pierre Naville sépare désormais la révolte et la créativité. Ce qui débouche vers un militantisme austère et routinier, insensible au bouillonnement créatif des luttes sociales.
Après la guerre, Pierre Naville rompt avec le trotskisme. Il observe que les vieux schémas ne fonctionnement pas. Le mythe de la guerre impérialiste qui débouche sur une révolution ne s’observe pas. Pierre Naville entend sortir de ce dogmatisme qui tente de faire rentrer la réalité dans des théories. Mais il ne renonce pas au marxisme et matérialisme historique. Loin des recettes toutes faites, il tente d’analyser la situation « dans ses particularités, ses singularités, ses aspects imprévisibles ». Pierre Naville fuit la secte trotskiste enfermée dans un « gauchisme sénile ». Mais il continue de croire à la nécessité de créer un Parti ouvrier pour réaliser un front uni avec le PCF et la SFIO.
Pierre Naville anime La Revue internationale avec son ami Gilles Martinet. Les articles abordent l’actualité de la recherche scientifique dans la biologie, les mathématiques, les lettres, les arts, l’histoire et les sciences sociales. Mais Pierre Naville vise à orienter la revue vers l’actualité et les enjeux politiques.
Pierre Naville poursuit son engagement politique. Dans le contexte de la guerre froide il rejette autant le capitalisme que le stalinisme. En 1948, il rejoint le Parti socialiste unitaire (PSU). Cette organisation regroupe notamment des anciens socialistes qui espèrent influer sur la ligne du PCF. Pierre Naville développe une critique de l’URSS. Il observe des inégalités sociales qui perdurent. Ensuite, le régime stalinien maintient la distinction entre tâche d’exécution et de direction. Pierre Naville propose de transformer la société soviétique dans un sens démocratique et prolétarien.
Coincé entre la SFIO et le PCF, le PSU reste un groupuscule impuissant loin de son objectif illusoire de rassembler les organisations ouvrières. Mais Pierre Naville continue de croire à un mouvement de rassemblement des forces de gauche. « Il multiplie les signes de bonne volonté, se fait le héraut de l’union des gauches tout en montrant une certaine rigueur doctrinale dans la défense d’un marxisme ambitieux », décrit Alain Cuenot. Malgré son marxisme critique, Pierre Naville se montre complaisant à l’égard du PCF et du stalinisme. Pris dans l’urgence militante, il estime que le rassemblement ne peut se faire sans le plus grand parti de la gauche. Ensuite, chercheur au CNRS, il se préoccupe d’accéder à une respectabilité scientifique dans un monde intellectuel contrôlé par les staliniens.
Mais les tentatives de rassemblements des gauches se heurtent au monde réel. Les bureaucrates du PCF ne veulent pas dialoguer avec les groupuscules de la nouvelle gauche. La SFIO s’enferme dans une politique colonialiste. Mais Pierre Naville continue de penser que les sections locales socialistes peuvent infléchir la politique de Guy Mollet.
Néanmoins, Pierre Naville développe des réflexions théoriques pertinentes. Il reprend l’analyse du capitalisme élaborée par Karl Marx. Il remet en cause l’exploitation mais également le travail, à l’image des théories de Paul Lafargue. Pierre Naville polémique également avec Jean-Paul Sartre, aligné sur le stalinisme du PCF. Pierre Naville analyse la fonction des intellectuels communistes qui forment une véritable classe sociale, supplétive de la classe bureaucratique. Leur conscience critique « s’aliène dans la satisfaction béate de l’esprit reconnu par le pouvoir ». La révolution ne peut provenir que des masses populaires et non de l’intelligentsia.
En 1957 est créée l’UGS (Union des gauches socialistes) qui bénéficie d’importants relais médiatiques comme France Observateur. Mais Pierre Naville tient à se démarquer d’un réformisme à la Pierre Mendès-France. Il affirme la nécéssité de l’abolition du salariat et de l’appropriation des moyens de production.
L’UGS dialogue avec le PSA qui regroupe des dissidents socialistes. Mais Pierre Naville regrette l’absence d’influence de l’UGS dans le mouvement ouvrier et les syndicats. Il critique également le PSA et ses nombreux parlementaires. Il souligne les limites de Pierre Mendès-France et du réformisme keynésien. Cette politique vise à aménager le capitalisme sans remettre en cause l’exploitation. Ensuite, Pierre Mendès-France prétend défendre l’intérêt général. Il gomme les antagonismes de classe. Pierre Naville participe à la création du Parti socialiste unifié (PSU). Contre toute forme de dirigisme ou d’autoritarisme, Pierre Naville valorise l’autogestion. Il estime que des comités d’entreprise et de citoyens doivent rédiger un contre-plan pour gouverner.
Pierre Naville devient une des figures de la sociologie du travail. Mais il reste attaché à la théorie marxiste. Il critique Alain Touraine et les modernistes du PSU qui insistent sur le développement des « couches nouvelles » avec les cadres et les ingénieurs. Pierre Naville insiste sur l’importance de la classe ouvrière et des rapports sociaux d’exploitation malgré le développement du secteur tertiaire. Pierre Naville critique également l’abandon de toute réflexion globale par une sociologie qui se spécialise sur des sujets précis. L’observation empirique délaisse l’élaboration théorique dans une sociologie tiède qui se veut objective. Pierre Naville s’attache à relier la sociologie avec le mouvement social pour penser le monde et sa transformation.
Le PSU soutient le mouvement de Mai 68, notamment la révolte des étudiants. Pierre Naville participe à la grève au CNRS. Il valorise la prise de décision à la base dans les assemblées générales. Il partage la critique de l’Université bourgeoisie et de ses mandarins. Mais Pierre Naville refuse d’intervenir comme un intellectuel et ne revendique pas ce statut supposé supérieur. Il partage les analyses du livre de Cohn-Bendit sur Le gauchisme remède à la maladie sénile du communisme. Ce livre reproche notamment aux groupes gauchistes d’être des « embryons de direction bureaucratique fabriquant des plannings révolutionnaires qui d’ailleurs ne sortent jamais du cercle restreint où ils ont été élaborés ».
Pierre Naville observe également l’impuissance des trotskistes et des maoïstes. Mais il ne partage pas la critique des syndicats comme bureaucraties qui tentent d’encadrer les luttes ouvrières. Pour Pierre Naville, les syndicats apparaissent au contraire comme des regroupements ouvriers combatifs dans les entreprises. Mais Pierre Naville valorise également la prise de décision à la base contre les vieux appareils.
L’évolution de la gauche reste déplorable. Le programme commun vise surtout à une bonne gestion du capitalisme. Le Parti communiste veut étatiser l’économie sans remettre en cause les rapports de production. Mitterrand incarne la gauche bourgeoise et l’arrivisme électoraliste. Pierre Naville ne se fait aucune illusion sur l’avenir de la gauche.
L’itinéraire de Pierre Naville dessine une trajectoire qui refuse le capitalisme libéral autant que la bureaucratie de l’URSS. Pierre Naville découvre la révolte avec le mouvement surréaliste. Mais il s’éloigne de la démarche poétique pour rejoindre le militantisme politique. Pierre Naville perçoit bien les limites d’un surréalisme qui privilégie la littérature et l’imaginaire sur l’action concrète dans la lutte des classes. Mais Pierre Naville abandonne également les apports du surréalisme qui propose une critique de l’emprise du capitalisme sur tous les aspects de la vie quotidienne. Les surréalistes attaquent les valeurs bourgeoises pour valoriser le plaisir et la créativité. Pierre Naville se limite à un marxisme révolutionnaire qui délaisse la critique de la vie quotidienne.
Pierre Naville s’engage pleinement dans la lutte politique. Mais il reste attaché à une conception trotskiste qui vise à construire un front uni. Plutôt que de s’appuyer sur les comités de grève et les assemblées de base, il préfère se fatiguer à construire une unité par en haut à travers un cartel de groupuscules. Il ne critique pas la logique bureaucratique des syndicats et des partis de gauche. Si Pierre Naville refuse le statut d’intellectuel, son militantisme reste déconnecté des luttes sociales qui s’expriment à la base. Il milite à coup de textes théoriques et de réunions politiciennes. C’est sans doute lié à l’héritage de la tradition trotskiste plus attachée au regroupement des organisations de gauche qu’à l’autonomie ouvrière.
Ensuite, Pierre Naville conserve un rapport complexe à l’URSS. Il propose une critique implacable de ce régime bureaucratique. Il soutient même les révoltes ouvrières contre l’URSS comme en Hongrie. Mais Pierre Naville continue de croire à une transformation interne de l’URSS. Il pense pouvoir redresser l’Internationale communiste avec le stalinisme et ses partis satellites. Il refuse d’attaquer ouvertement le parti communiste français, ses méthodes staliniennes et son encadrement réformiste des luttes.
Pierre Naville incarne aussi les limites d’un socialisme autogestionnaire. Pour théoriser la transformation sociale, il ne s’appuie pas sur les luttes autonomes. Il reste dans la proposition d’un contre plan élaboré sous forme de démocratie participative. Il propose une autogestion de l’existant et une modernisation du capitalisme. Il pense qu’il faut s’appuyer sur des revendications réformistes comme les 35 heures. Au contraire, ce sont les luttes autonomes qui doivent déboucher vers un mouvement de rupture avec le capitalisme. Pierre Naville semble donc éloigné des courants de l’autonomie ouvrière et du communisme libertaire. Il reste attaché à un réformisme radical, avec un changement par étapes successives.
Malgré ces quelques limites, Pierre Naville propose une réflexion originale et développe même une critique du travail. Il reste un trotskiste ouvert qui tente de penser les évolutions de la société. Il n’hésite pas à s’impliquer dans des combats minoritaires. Sa trajectoire qui le conduit du surréalisme au marxisme révolutionnaire reste attachante.
Sources :
Alain Cuenot, Pierre Naville. Biographie d’un révolutionnaire. Tome 1. De la révolution surréaliste à la révolution prolétarienne, 1904-1939, L’Harmattan, 2017
Alain Cuenot, Pierre Naville. Biographie d’un révolutionnaire. Tome 2. Du front anticapitaliste au socialisme autogestionnaire, 1939-1993, L’Harmattan, 2017