Les limites d'un mouvement : édito n°24

Publié le 11 Juin 2016

Les limites d'un mouvement : édito n°24

Un vent de contestation souffle à nouveau en France. Un mouvement inter-professionnel, le premier depuis 2010, émerge tranquillement. Sans explosion spontanée ni essoufflement brutal. Au-delà de l’enthousiasme militant, il semble important de pointer les limites de la lutte actuelle.

J’ai déjà eu l’occasion de développer une analyse critique du mouvement actuel et de ses perspectives. Il faut surtout déplorer le maintien du cadre syndicaliste. Les Nuits Debouts et  les grévistes, surtout dans les bastions de la CGT qui fourmillent de permanents, ne proposent rien de nouveau.

Il n’est jamais question de critiquer le capitalisme, mais seulement ses excès. A travers la Loi Travail et son monde, c’est surtout la « dérive » néolibérale qui reste visée. Pas question de remettre en cause le travail et la marchandise, ni même l’exploitation et la propriété des moyens de production.

Les syndicats jouent parfaitement leur rôle d’encadrement de la révolte. Et pas uniquement à travers la brutalité de leurs services d’ordre. Les syndicats maintiennent la séparation des luttes entre les différents secteurs. Les bureaucrates ne jurent que par les inter-syndicales et réunions d’état-major et empêchent le développement des assemblées de base.

Il reste les actions de « blocage de l’économie » pour maintenir un vernis de contestation. Les activistes servent alors de force d’appoint aux syndicats. Mais ces actions ne sortent pas du cadre de la négociation entre partenaires sociaux. Le blocage de l’économie doit rester temporaire, voir en concertation avec les autorités.

Mais ce mouvement rampant peut perdurer suffisamment longtemps pour sortir du carcan syndicaliste. Des manifs sauvages permettent la radicalisation d'une jeunesse. Des rencontres se créent, des zadistes et autres alternatifs peuvent cotoyer des cheminots sur des barricades. Des assemblées de lutte peuvent se créer pour permettre une autonomie par rapport aux appareils bureaucratiques.  Il semble  indispensable de sortir des vieilles routines militantes, pour mieux libérer la spontanéité et la créativité dans la lutte.

 

Ce numéro peut permettre de revenir sur les perspectives du mouvement en cours. Une tendance rêve de créer un Podemos à la française. Ramener les luttes dans le cadre du système représentatif reste une impasse. Une autre tendance prétend « changer le monde sans prendre le pouvoir ». Les alternatives concrètes sont alors valorisées. Mais la destruction de le marchand n’est jamais envisagée. Les courants marxistes et libertaires proposent des perspectives de rupture révolutionnaire. Mais ils comportent également quelques limites, dont un certain encadrement avant-gardiste plus ou moins affiché.

Ce sont les intellectuels qui insistent le plus sur le rôle des idées dans le changement social. L’histoire des intellectuels montre un lien particulier avec la politique. Il semble indispensable d’abolir les intellectuels comme classe sociale pour permettre une véritable émancipation humaine.

Pour transformer la société, il faut également inventer un nouvel imaginaire. Des expérimentations artistiques rythment la vie urbaine à la fin du XIXe siècle aux Etats-Unis. L’histoire de Montmartre révèle le bouillonnement d’un quartier populaire de révoltes et de plaisirs.

Ce sont toutes les relations humaines qui doivent être transformées. Le roman des Liaisons dangereuses se penche sur le libertinage et les stratégies de séduction. La logique marchande s’étend désormais sur l’amour et la sexualité. La Théorie critique permet de pensée l’aliénation marchande mais aussi la libération sexuelle. La répression des désirs perdurent encore aujourd’hui. Le clitoris et le plaisir féminin restent encore invisibles. Un mouvement révolutionnaire doit aussi s’emparer du plaisir comme arme politique.

 

Sommaire n° 24 :

 

Perspectives des mouvements sociaux

Le modèle politique de Podemos

Les alternatives concrètes et leurs limites

L'anarchisme contre le marxisme

 

Intellectuels critiques et critique des intellectuels

Histoire des intellectuels

Intellectuels et critique politique

 

Imaginaires urbains

Lewis Munford et l'art des Brown Decades

Les plaisirs populaires de Montmartre

 

Libérations sexuelles

La postérité des Liaisons dangereuses

Théorie critique et libération sexuelle

Plaisir féminin et clitoris

 

Bonus radio

Une analyse critique du mouvement actuel et de ses perspectives

Publié dans #Numéros complets

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