L'antipsychiatrie : histoire d'une lutte
Publié le 6 Septembre 2011
Dans un entretien radiophonique Jacques Lesage de la Haye décrit son expérience dans lutte de l’anti-psychiatrie mais également le climat de toute une époque.
L'antipsychiatrie pose des questions essentielles comme celle de l'enfermement et de la liberté, de la folie et de la norme sociale. Cette lutte, aujourd’hui disparue, soulève des enjeux décisifs.
Jacques Lesage de la Haye retrace son parcours personnel qui se confond avec l'histoire de l'anti-psychiatrie. Auteur d'un ouvrage sur cette lutte, il offre un précieux témoignage au cours d'un entretien dans une émission de radio. Il subit la prison dans sa jeunesse, tandis que son frère connaît l'enfermement psychiatrique. Jacques Lesage de la Haye participe au Groupe d'information sur les prisons, animé par Michel Foucault. L'enfermement psychiatrique s'apparente alors à la prison, avec l’asile qui abrite les patients. Jacques Lesage de la Haye travaille comme psychologue dans un hôpital psychiatrique. Dans ce contexte il fait le choix de lutter contre la psychiatrie et son monde.
D'autres formes de thérapies émergent. Lucien Bonaffé estime que les patients peuvent retourner chez eux après la journée de thérapie dans l'hôpital. En Grande-Bretagne des médecins vivent avec leurs patients. "Nous sommes tous fous" proclamme l'antipsychiatrie qui remet en cause la notion de folie et de norme imposée socialement. Chacun doit vivre avec sa propre folie tout en construisant une nouvelle forme de communauté humaine. La séparation entre soignant et soigné disparaît dans les expériences de psychothérapie institutionnelle. Dans de nombreux pays européens, une effervescence contestataire impulse la lutte contre la psychiatrie.
L'antipsychiatrie disparaît en 1975 pour laisser place à l'alternative à la psychiatrie. Des communautés alternatives doivent construire de nouvelles relations humaines. Cependant, comme le souligne Jacques Lesage de la Haye, l'éducation à la liberté et au plaisir n'existe pas dans la société capitaliste. Ses lieux de vie alternatifs s'effondrent donc rapidement. L'argent et la sexualité provoquent de nombreux conflits. Les individus qui vivent en communauté sont issus d’une société capitaliste : ils en adoptent souvent les pratiques et les comportements. Après 1981, les tenants de la psychiatrie alternative se rallient au pouvoir socialiste tandis que les lieux de vie n'ont plus rien de contestataire
Cette lutte s’inscrit dans le contexte des années 1970, avec une ébulition révolutionnaire. La critique radicale de la vie quotidienne se répand. L’anti-psychiatrie tente d’aporter des solutions alternatives et thérapeutiques. L’expérimentation prévault sur les certitudes face à des personnes qui se retrouvent dans des situations particulièrement difficiles. L’anti-psychiatrie s'inscrit également dans une remise en cause de l’ensemble de la société. Comme le soulignent les psychanalistes reichiens, l’éducation, la famille, les institutions et les contraintes sociales génèrent de la frustration et une « cuirasse caractérielle » chez tous les individus. Avec l’expérimentation thérapeutique, une révolution sociale et sexuelle doit aussi se construire.
Face à cet ordre répressif, Jacques Lesage de la Haye souligne l’importance d’une politique de la liberté et du désir.
L'entretien radio sur l'histoire de l'antipsychiatrie avec Jacques Lesage de la Haye, avec de nombreux liens
Une intervention en vidéo de Jacques Lesage de la Haye sur l'enfermement psychiatrique
Des textes sur l'antipsychiatie dans le site libertaire de Philippe Coutant
Le journal Sans Remède adopte le point de vue des patients à partir de leur expérience
Un entretien avec deux créateurs du journal Sans Remède
Le programme des rencontres "résister à la psychiatrie" les 9, 10 et 11 septembre 2011
Brochure "A claire voix. Manuel de savoir être fou dans la société"
Vidéo Débat: La psychiatrie sous contraintes