La France ingouvernable : édito 28
Publié le 8 Avril 2017
Tous les candidats aux élections sont discrédités. Fillon, qui se gave et nous propose de nous serrer la ceinture, ne provoque que des éclats de rire. Le renouveau Macron empeste le hollandisme de fin de règne. Hamon doit s'encombrer des caciques du PS qui ne perdent jamais une occasion de dénoncer son sectarisme gauchiste. Le FN peine à organiser un meeting sans déclencher une émeute. Leur élection promet une France ingouvernable et le règne du désordre.
Reste le phénomène Mélenchon, le plus redoutable et talentueux des politiciens en course. Son improbable élection serait une catastrophe. En Grèce le gouvernement de Syriza a permis de liquider la révolte sociale. Les grands mouvements de grève ont disparu et l'extrême gauche applique une politique d'austérité. Bien que coupé des mouvements sociaux, le tribun Mélenchon conserve le profil de celui qui peut endormir la révolte. Son programme illusoire et ses promesses en carton visent à désamorcer la contestation sociale. Retour au plein emploi, CDI pour tous, protectionnisme et plan de relance keynésien : il ne fait que ressortir les vieilles recettes d'une social-démocratie à bout de souffle. Un programme de l'aménagement de l'exploitation ni désirable ni même réaliste dans le contexte d'un chômage structurel de masse.
Mélenchon reste pourtant épargné par l'appel Premier tour social. Ce texte a le mérite de sortir de la contemplation anti-électoraliste pour s'appuyer sur des luttes emblématiques et sur les mouvements de grèves. Mais, pour les vieux routiers du gauchisme à l'origine de cet appel, les mouvements sociaux doivent se contenter de faire pression sur l'Etat et le gouvernement pour grappiller un peu plus de droits. Ce qui reste sympathique. Mais il n'est pas question d'un mouvement social d'ampleur, de l'auto-organisation des exploités dans une perspective de rupture avec le capitalisme et l'Etat.
Ce numéro s'ouvre sur des mouvements sociaux au long court. L'histoire de France reste rythmée par des vagues de révoltes spontanées. Les luttes ouvrières restent importantes avec leurs mouvements sociaux et leur culture politique. Les luttes afro-américaines, entre révoltes immédiates et construction à long terme, permettent de changer la société. Mais l'histoire des révoltes reste marquée par les défaites et la mélancolie. Néanmoins, ce sont bien les orgasme de l'histoire qui permettent d'améliorer notre quotidien. Bien plus que les bulletins de vote.
Le débat sur l'identité découle de la disparition de la conscience de classe. Une mouvance identitaire diffuse des idées racistes et cible les musulmans. Inversement, la gauche n'est pas à l'abris de dérives. La lutte contre le racisme anti-musulman débouche moins sur la solidarité entre français et immigrés que sur l'affirmation d'une identité indigène.
Mais il semble important de décentrer le regard sur les révoltes sociales qui ne se réduisent pas au mouvement ouvrier occidental. Les révolutions africaines luttent contre l'impérialisme dans le contexte bouillonnant des années 1968. Les luttes indigènes à travers le monde s'opposent à la colonisation du capital. Mais, sans le repère de la lutte des classes, ces mouvements peuvent aussi sombrer dans la cogestion avec les pouvoirs établis.
La Pop culture permet également de repenser l'imaginaire émancipateur. Issue de la rue, cette culture ébranle l'ordre existant et exprime la contestation de la jeunesse. Le rap français renouvelle le langage de la révolte et propose une critique de la société française. Le plaisir de la Pop culture peut alimenter le désir de révolution.
Sommaire n° 28 :
Mouvements sociaux historiques
Mouvements identitaires
Mouvements contre l'impérialisme
Mouvements culturels