La contestation de la modernisation industrielle
Publié le 28 Octobre 2013
Des historiens reviennent sur les résistances et les réflexions critiques qui s’opposent au consensus autour de la modernisation des « Trente glorieuses » dans la France de l’après 1945.
Croissance et progrès scientifiques ont alimenté la prospérité de la France entre 1945 et 1975. Les Trente Glorieuses apparaissent comme un mythe indéboulonnable. Ce modèle de société industrielle et technologique permet le développement de la civilisation des loisirs et de la consommation. Des politiciens de gauche et d’extrême gauche aux intellectuels, un regard émerveillé est porté sur ce modèle fordiste de production industrielle et de consommation de masse.
Dans un livre récent, des universitaires critiquent cette vision idyllique de la période des « Trente Glorieuses ». Cette expression s’impose comme une évidence. Pourtant elle est forgée par Jean Fourastié, un expert fervent partisan de la modernisation de la France considérée alors comme une « société bloquée » et engluée dans ses archaïsmes. La France rurale et vieillissante doit devenir urbaine, rajeunie et industrialisée. Pourtant cette marche consensuelle vers le productivisme, décrite dans les manuels d’histoire, se heurte à une forte contestation.
Ses historiens critiques s’attachent à démystifier cette période de modernisation. Derrière un processus présenté comme naturel ils se penchent sur ses acteurs, au service de l’État. L’idéologie de la modernisation occulte les conflits de classe, et notamment la réalité de la vie des ouvriers. Les conséquences écologiques de l’industrialisation et du mode de vie consumériste ne sont pas évoqués par les récits enthousiastes sur la croissance économique. La critique de l’aliénation technologique et de la destruction du lien social a également été marginalisée par les historiens. L’écologie politique découle également d’une critique radicale de la bureaucratie. De nombreuses luttes s’opposent à cette modernisation.
Ce livre permet d’ouvrir la réflexion pour aujourd’hui. L’écologie s’apparente désormais à une idéologie spécialisée et déconnectée de la vie quotidienne. Les luttes contre l’aéroport de Notre-Dame des Landes ou l’opposition au nucléaire semblent très limitées. Ses simples résistances ne débouchent pas vers une critique de la civilisation industrielle et de l’appauvrissement du vécu.
La catastrophe écologique découle des choix imposés au cours des Trente Glorieuses. Des conséquences désastreuses caractérisent cette période de croissance et de productivité.
Christophe Bonneuil évoquent la pollution, avec la consommation de pétrole et de charbon. Si le progrès technique augmente les rendements, les ouvriers doivent subir des accidents, des maladies et des nuisances. L’économie repose sur le gaspillage avec une faible durée de vie des produits de consommation. La pollution de l’eau et de l’air se développe avec l’augmentation de la consommation d’énergie. La nourriture subit également la pollution avec le productivisme agricole.
Jean-Baptiste Fressoz et François Jarrige analysent l’idéologie productiviste. Des libéraux aux communistes, l’idée de progrès et de reconstruction devient consensuelle dans la France de l’après guerre. « Le progrès par la technique s’imposait comme un impératif non négociable : les citoyens devaient produire, consommer et s’en remettre, pour le reste, au trio chercheur, entrepreneur et politique », décrivent Jean-Baptiste Fressoz et François Jarrige. Ce compromis fordiste permet d’améliorer les conditions de vie des classes moyennes et populaires. L’histoire économique, incarnée par l’école des Annales, entend fournir une expertise pour permettre la modernisation de la France et éviter les erreurs du passé.
La comptabilité et les standards quantitatifs permettent de construire un récit optimiste, dans le sillage de la « révolution industrielle ». L’augmentation de la croissance devient un objectif consensuel partagé par l’État, les patrons et les syndicalistes. Le progrès technique et l’innovation sont considérés comme les sources de la croissance et de la prospérité économique.
Régis Boulat revient sur la figure de Jean Fourastié, apôtre de la productivité, qui invente l’expression des « Trente Glorieuses ». Ce technocrate contribue « à familiariser les élites économiques et le public cultivé à l’idée d’une évolution inévitable vers une société de loisirs et d’abondance, grâce au progrès technique et au productivisme », décrit Régis Boulat.
Gabrielle Hecht revient sur l’histoire du nucléaire en France, qui s’inscrit pleinement dans la mythologie des Trente glorieuses. L’historienne souligne la dimension « technopolitique » de l’atome : les dimensions technique et politique se confondent. Le nucléaire, civil ou militaire, participe à l’identité nationale. L’Empire colonial permet l’exploitation de l’uranium.
Avant Mai 68 et l’émergence du mouvement écologiste se développe une contestation du mode de vie, de production et de consommation de la société française de l’après-guerre. Cette critique de l’aliénation attaque la monotonie, la perte d’intériorité et de liberté. Mais cette critique du progrès et du capitalisme moderne devient rapidement stigmatisée et marginalisée. Les opposants à la modernisation sont considérés comme étant à rebours de l’histoire et attachés à une France rurale jugée pétainiste. L’expertise permet également de dépolitiser les débats.
Sezin Topçu évoque les résistances au nucléaire, civil ou militaire. L’historiographie dominante renvoie la contestation de l’arme atomique à une simple instrumentalisation du Parti communiste dans un contexte de guerre froide. L’angoisse face au nucléaire, bien que refoulée, existe réellement. La construction du centre de Saclay est contestée par des paysans et des riverains. Le mouvement pacifiste, d’inspiration chrétienne et communiste, propose une critique morale de la bombe H. Le mouvement pacifiste dénonce également les risques sanitaires et environnementaux de la radioactivité des essais nucléaires. Cette critique ouvre vers une dénonciation globale de l’atome, que son utilisation soit militaire ou civile.
« Le risque apocalyptique dans un premier temps, le risque sanitaire dans un second temps, provoquèrent diverses formes de contestations et mobilisations bien avant 1968 », décrit Sezin Topçu. L’historienne évoque ensuite la marginalisation de cette critique. La propagande officielle défend l’atome. La société de consommation augmente les besoins en énergie et favorise ainsi le développement de l’électricité nucléaire. La publicité incite à acheter toujours plus d’équipements électroménagers. Des films banalisent l’atome. Inversement, les oppositions au nucléaire sont considérées comme pathologiques, et non comme politiques, renvoyées à une peur du progrès et à un attachement à un archaïsme désuet.
Le sociologue Alain Touraine insiste sur les « nouveaux mouvements sociaux » des années 1970. Il tend alors à effacer la mémoire des luttes contre le nucléaire qui émergent avant Mai 68.
Renaud Bécot évoque la contestation du productivisme par le mouvement ouvrier. Aujourd’hui, les syndicats semblent nostalgiques de la société des Trente glorieuses et de l’industrialisation. Pourtant, la croissance n’occupe pas une place centrale dans l’histoire ouvrière, contrairement à ce que prétendent les écologistes.
Dans l’immédiat après-guerre, les syndicats défendent une société d’abondance fondée sur le travail. Pourtant, les ouvriers observent que l’augmentation de la productivité ne permet pas une amélioration de leurs conditions de vie. La croissance industrielle, avec ses risques sanitaires, favorise surtout une dégradation des conditions de travail. La CGT ne conteste pas forcément le progrès technique mais surtout la gestion de ces innovations par les entreprises. Le syndicat dénonce « une démarche capitaliste de rentabilité et d’accélération du rythme de travail, affectant la sécurité des salariés et négligeant les besoins réels des populations », décrit Renaud Bécot.
Nicolas Hatzfeld observe les luttes ouvrières à Peugeot-Sochaux. Les revendications syndicales évoluent à la fin des années 1950 et ne se limitent plus à un cadre quantitatif. Ses revendications sont alors « posées en termes de cadences, de programme de production, d’engagement, d’équilibrage… bref, en termes se référant aux nouvelles règles d’organisation du travail », analyse Nicolas Hatzfeld. L’intensification du travail et les cadences deviennent la cible de la contestation ouvrière. Les préoccupations sanitaires deviennent importantes. A partir de 1959, la CFDT développe une critique du progrès et prend en compte les facteurs environnementaux dans son projet de planification démocratique. « En procédant ainsi, ils refusaient de fragmenter la réponse aux enjeux environnementaux et entendaient lier ses choix à la transformation des modèles de production et de consommation », observe Renaud Bécot.
La CFDT n’hésite pas à attaquer la société de consommation. En 1963, le syndicat dénonce même un « embourgeoisement des travailleurs ». Les structures de production et de consommation sont critiquées, tout comme le mode de vie des classes populaires. En 1965, la CFDT critique cette individualisation par la consommation. Même si la lutte contre l’exploitation du travail demeure centrale. Toutefois, cette préoccupation des enjeux environnementaux distingue la CFDT de la CGT qui semble plus scientiste. La CFDT critique même l’urbanisme. La lutte pour le logement s’articule avec une amélioration du cadre de vie.
L’écologie se réduit aujourd’hui à une morale qui valorise des comportements individuels. Renaud Bécot souligne que, inversement, « les analyses syndicales passées suggèrent une approche alternative, qui réhabilite les capacités d’action sociale face à la crise écologique ».
Christian Roy présente la critique de la technique issue du milieu chrétien. Bernard Charbonneau et Jacques Ellul, proches de la revue Esprit, critiquent la société des Trente glorieuses. A partir des années 1970, ils influencent les courants de l’écologie radicale et de la critique de la science.
Bernard Charbonneau dialogue avec le personnalisme et Emmanuel Mounier. Mais il critique le progrès technique avec des objets comme l’automobile. Il propose même un « effort pour modifier les structures de notre civilisation ». Il attaque également l’État avec son organisation qui impose une domination rationnelle et efficace. L’État s’apparente alors à une machine sociale.
Bernard Charbonneau se distingue au sein de la nébuleuse personnaliste. Il s’oppose à Mounier qui embrase joyeusement le processus de modernisation. Il s’oppose également à Bernanos. Cet écrivain dénonce un monde de robots mais ne cesse de défendre la nation et la religion traditionnelle comme seuls recours. Pourtant, Bernanos dénonce également la civilisation moderne comme une « conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure ». Il réhabilite la dimension spirituelle contre la froide mécanique des objets matériels.
Bernard Charbonneau défend le monde paysan contre la modernisation productiviste à laquelle collaborent les syndicats des agriculteurs. Il s’oppose notamment à la FNSEA dirigée par les Jeunesses agricoles chrétiennes (JAC). Il refuse pourtant de se joindre à des mouvements réactionnaires et poujadistes mais insiste sur l’importance de l’agriculture biologique. En revanche, Bernard Charbonneau demeure critique face aux utopies communautaires qui fleurissent après Mai 68. Ce mouvement « ne réalise aucun de ses rêves d’abolition de l’usine, de la caserne, de l’école », observe Bernard Charbonneau.
Kristin Ross se penche sur la critique de la vie quotidienne. A partir des années 1950 une vie familiale de classe moyenne se soumet au cadre standardisé de la consommation et des loisirs. Cette critique de la vie quotidienne refuse le cloisonnement des disciplines universitaires. Ce courant intellectuel rejette également le structuralisme qui insiste sur les habitudes et la reproduction des structures sociales.
Des auteurs comme Henri Lefebvre ou Roland Barthes observent l’arrivée des biens de consommation de masses dans la vie quotidienne. Ils estiment que le capitalisme moderne modifie l’expérience vécue. La revue Arguments incarne la nouvelle gauche intellectuelle influencée par un marxisme hétérodoxe. Cette revue se penche sur des sujets peu académiques, comme l’amour. « Cela signifiait prendre au sérieux la « culture » et les formes de plaisir comme une dimension sans laquelle les transformations historiques, passées et présentes, ne pourraient tout simplement pas être pensées correctement », souligne Kristin Ross. Les pratiques de consommation sont analysées car elles participent à la légitimation du système marchand. L’idéologie n’est plus considérée comme une superstructure extérieure aux individus mais comme le résultat des actions humaines.
La critique de la vie quotidienne dénonce une expérience vécue organisée, canalisée et codifiée à travers des modèles répétitifs. Un mode de vie standardisé et routinier s’impose. « Mais le quotidien chez Lefebvre portait à la fois la possibilité de la réalisation des besoins et des désirs humains et celle de leur non-réalisation », précise Kristin Ross. Le quotidien n’est pas simplement morne et inauthentique mais peut également ouvrir de nouvelles possibilités d’existence. La culture populaire et les biens de consommation contiennent également des désirs bien réels. « L’aliénation dans la vie quotidienne doit être située dans une tension dialectique avec les forces de la critique et de l’émancipation », souligne Kristin Ross.
Patrick Marcolini présente la critique situationniste du capitalisme moderne. Ce mouvement s’inscrit dans le sillage des avant-gardes artistiques et de la révolte esthétique et politique issue du romantisme révolutionnaire. Ses mouvements critiquent les conditions de vie qui s’imposent à leur époque. L’Internationale situationniste (IS) semble influencée par le surréalisme et le lettrisme avant de se tourner vers les marges du marxisme et de l’anarchisme. « Quoi qu’il en soit, tout au long de cette trajectoire, création et subversion, "critique de la vie quotidienne" en régime capitaliste et expérimentation de nouvelles formes d’expériences désaliénées, restent pour les situationnistes impossibles à distinguer les unes des autres », souligne Patrick Marcolini. L’IS dénonce la société des années 1950 et 1960 avec la banalité de l’existence qui se réduit à une accumulation de produits de consommation. « Entre l’amour et le vide-ordures automatique, la jeunesse a fait son choix et préfère le vide-ordures », ironise Gilles Ivain en 1958.
Les situationnistes attaquent l’emprise de l’urbanisme sur la vie quotidienne. A travers la dérive, ils expérimentent les possibilités de s’approprier l’espace urbain. Cette pratique doit déboucher vers une transformation de la ville et de son architecture pour multiplier les possibilités de parcours et de rencontres. Cette démarche doit « favoriser la construction consciente des situations de la vie quotidienne en vue de leur donner une intensité poétique ou affective particulière », souligne Patrick Marcolini. Un « urbanisme nouveau » doit permettre une traversée de la ville qui s’apparente à un éternel voyage. L’architecture, les ambiances, les émotions doivent correspondre aux désirs des habitants. Chacun peut traverser la ville en se laissant bercer par les atmosphères différentes et les nouvelles rencontres. Cette utopie dénonce l’urbanisme des années 1960, incarné par Le Corbusier, avec ses HLM et son architecture morne et standardisée. La traversée de la ville devient alors une routine sinistre. L’urbanisme moderne organise la ville autour du travail, du logement et des loisirs. Contre cette planification de l’ennui, les situationnistes privilégient le hasard et la poésie. Ils dénoncent également cet urbanisme qui impose un quadrillage de l’espace urbain pour faire de la ville un décor artificiel.
Les situationnistes estiment que le mode de vie moderne impose une atomisation des individus. La division de travail, toujours plus spécialisée, alimente une individualisation qui détruit les communautés humaines. Le travail, vide de sens, est « ramené à une exécution pure, donc rendue absurde », analyse Guy Debord en 1960. Les situationnistes sont influencés par Socialisme ou barbarie. Ce groupe révolutionnaire observe les conditions de travail de la classe ouvrière et lutte pour les Conseils ouvriers afin de permettre une réorganisation de la production par les travailleurs eux-mêmes. Mais les situationnistes insistent sur la perte de sens avec une existence réduite à la routine du travail et de la consommation. La société moderne impose une standardisation des comportements et des modes de vie. Guy Debord analyse l’aliénation moderne et la « société du spectacle » qui réprime les désirs pour construire de faux besoins.
Malgré l’accumulation d’objets de consommation, un appauvrissement de la vie quotidienne s’observe. En 1961, l’IS estime que « les gens sont aussi privés qu’il est possible de communication ; et de réalisation d’eux-mêmes ». L’IS dénonce la richesse quantitative et propose une amélioration qualitative de la vie à travers une « intensité du vécu ». La routine et l’ennui doivent être remplacés par la fête, le jeu, le plaisir d’un dialogue amical ou d’une rencontre amoureuse. Les situationnistes attaquent la société moderne. Ils remettent en cause le règne de l’économie, « comme obsession du calcul et du quantitatif, étendue à tous les domaines de la vie humaine et devenue fin en soi », résume Patrick Marcolini.
Les idées situationnistes se diffusent progressivement. L’IS semble d’abord s’adresser aux milieux artistiques et politiques. Mais sa critique originale influence toute une partie de la jeunesse. C’est la révolte de Mai 68 qui permet de donner un large écho aux idées situationnistes. Mais cette réflexion retourne rapidement dans l’oubli. Le postmodernisme supplante les théories révolutionnaires. Ensuite les situationnistes refusent de se conformer aux codes de la bienséance intellectuelle et académique. Ils pratiquent le scandale et l’insulte. Ils utilisent l’humour et l’érotisme. Les historiens préfèrent donc ne pas évoquer cette aventure intellectuelle, jugée trop peu sérieuse et légitime.
Malgré leur critique du capitalisme technocratique et de la modernité marchande, les situationnistes partagent une fascination pour la techno-science. Pourtant, leur réflexion alimente une critique du progrès industriel et de l’aliénation dans la vie quotidienne.
Source : Céline Pessis, Sezin Topçu, Christophe Bonneuil (dir.), Une autre histoire des « Trente Glorieuses ». Modernisation, contestation et pollutions dans la France d’après-guerre, La Découverte, 2013
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